Espion contre espion
D’emblée, l’historien de Harvard Calder Walton affirme dans un nouveau livre que les dirigeants occidentaux n’ont reconnu que tardivement les vulnérabilités de leurs sociétés ouvertes et l’ampleur de la menace posée par les services de renseignement soviétiques. Font-ils la même erreur avec la Chine ?
GLOUCESTER, MASSACHUSETTS – Les études sur le rôle des opérations de renseignement ressemblent inévitablement à celles de Rashomon, les mêmes événements donnant lieu à des interprétations diverses, parfois contradictoires. Le monde du renseignement, après tout, est un monde de secrets, de compartiments à accès spécial, d’actions secrètes, de relations clandestines et parfois d’escapades officieuses. Cela rend très difficile l’évaluation des succès et des échecs, ainsi que la chronique du rôle du renseignement dans les décisions des dirigeants politiques.
L’historien de Harvard, Calder Walton, affronte ce défi de front dans un nouveau livre, Espions : la guerre épique du renseignement entre l’Est et l’Ouest, qui retrace l’essor et le rôle des capacités de renseignement modernes à travers l’histoire de la concurrence de l’Occident avec les services de sécurité russes. Il s’agit d’une histoire ambitieuse et divertissante, mais également solidement ancrée dans la recherche universitaire. En fait, le récit de Walton jette un nouvel éclairage sur des événements apparemment bien étudiés, depuis la révolution bolchevique et la Seconde Guerre mondiale jusqu’au déploiement de taupes dans les rangs des services de renseignement américains, britanniques et russes à la fin du siècle.
Walton s’appuie sur des archives récemment ouvertes, des histoires internes autrefois classifiées, des mémoires et des entretiens avec des décideurs politiques et des espions. Il met ainsi en lumière la manière dont le renseignement a contribué à des épisodes tels que la crise des missiles de Cuba en 1962 et l’incident de l’Able Archer en 1983, lorsqu’un exercice de l’OTAN a déclenché les craintes soviétiques d’une première frappe occidentale, amenant le monde au bord d’une guerre nucléaire.