Une étude sur la bromation aromatique électrophile jette le doute sur l’intermédiaire des manuels scolaires

Une étude sur la bromation aromatique électrophile jette le doute sur l’intermédiaire des manuels scolaires

Une nouvelle étude informatique s’ajoute aux preuves croissantes selon lesquelles les réactions de bromation aromatique électrophile suivent une voie d’addition-élimination et non le mécanisme classique décrit dans les manuels.1

La bromation des substrats aromatiques constitue une étape importante dans la synthèse de divers produits pharmaceutiques, pesticides, retardateurs de flamme et colorants. Les cours de chimie organique de premier cycle enseignent souvent que de telles réactions de substitution aromatique électrophile se déroulent via un carbocation, connu sous le nom d’intermédiaire de Wheland, qui est conjugué mais non aromatique. Cependant, des études récentes sur ces réactions utilisées depuis longtemps suggèrent qu’elles se produisent en réalité via des voies de substitution directe et d’addition-élimination. Par exemple, une étude DFT réalisée en 2011 a observé que les barrières à l’ajout de brome aux arènes du tétrachlorométhane étaient plus petites que celles liées à la substitution directe.2 De même, une étude informatique et expérimentale conjointe réalisée en 2014 a révélé que la chloration de l’anisole se faisait via une voie d’addition-élimination.3

Aujourd’hui, Frank De Proft de l’Université libre de Bruxelles, en Belgique, et ses collègues ont utilisé le DFT pour étudier la bromation électrophile du benzène, de l’anisole et du nitrobenzène en phase gazeuse et en solution. Ils ont constaté que les trois réactifs favorisaient une voie de bromation par addition-élimination. De plus, ils n’ont pas observé d’intermédiaire de Wheland dans l’acétonitrile, le tétrachlorométhane ou en phase gazeuse.

« Contrairement à ce que l’on croit souvent, cette (étude) montre que le contrôle cinétique de la bromation aromatique électrophile n’est pas uniquement motivé par la perte temporaire d’aromaticité lors d’une attaque électrophile, mais également par la force de la délocalisation électronique ainsi que par un équilibre entre les interactions non covalentes attractives et répulsives entre les partenaires de réaction», note De Proft.

Source : © Frank De Proft/Vrije Universiteit Brussel

Aperçu général du mécanisme de réaction de bromation préféré pour le benzène, l’anisole et le nitrobenzène (de gauche à droite)

Les chercheurs ont également étudié la régiosélectivité des réactions à l’aide d’une série d’indices géométriques et électroniques. L’anisole était bromé préférentiellement au para position en raison d’une délocalisation électronique plus forte et d’interactions attractives dans l’état de transition correspondant. En revanche, le méta Cette position a été préférée pour le nitrobenzène en raison de conflits stériques au niveau ipso carbone pour les voies menant au ortho et para des produits. «Pour (les arènes comportant des groupes attracteurs d’électrons), les états de transition déterminant la vitesse… ressemblent chimiquement davantage à l’intermédiaire de réaction qu’au réactif initial», ajoute De Proft.

«Ce que j’ai trouvé étonnant, c’est qu’après 150 ans de reportage sur cette réaction, nous discutons toujours de son mécanisme de réaction», commente Miquel Solà i Puig, expert en chimie computationnelle et en aromatique de l’Université de Gérone, en Espagne. « Je pense qu’il est très important, lorsqu’on discute du mécanisme de réaction de cette réaction, de dire aux étudiants que l’intermédiaire de Wheland est une hypothèse qui s’est avérée fausse. »

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