Somnambulisme vers un conflit accidentel
L’argument minimisant le risque d’une guerre entre grandes puissances – selon lequel le monde globalisé et interconnecté d’aujourd’hui a trop d’enjeux pour risquer un dénouement sismique – est douloureusement familier. C’est le même argument qui a été avancé au début du XXe siècle, lorsque la première vague de mondialisation était à son apogée.
NEW HAVEN – Trop d’observateurs ont perdu de vue l’une des principales leçons de la Première Guerre mondiale. La Grande Guerre a été déclenchée par le assassinat de l’archiduc autrichien François-Ferdinand en juin 1914, qui s’est produit dans le contexte d’un conflit qui couvait depuis longtemps entre les grandes puissances européennes. Cette interaction entre l’escalade du conflit et une étincelle politique a une résonance particulière aujourd’hui.
Avec la guerre qui fait rage en Ukraine et une mentalité de guerre froide qui s’empare des États-Unis et de la Chine, il est impossible de confondre les parallèles historiques. Le monde bouillonne de conflits et de ressentiments. Il ne manque plus qu’un événement déclencheur. Avec les tensions à Taïwan, dans la mer de Chine méridionale et en Ukraine, il y a de nombreuses étincelles possibles dont il faut s’inquiéter.
Taïwan est un candidat de premier plan. Même si, comme moi, vous n’acceptez pas le point de vue américain selon lequel le président Xi Jinping a consciemment raccourci le délai de réunification, les actions récentes du gouvernement américain pourraient finir par lui forcer la main. L’ancienne présidente de la Chambre, Nancy Pelosi, s’est rendue à Taipei en août dernier, et son successeur, Kevin McCarthy, semble déterminé à faire de même. Le nouvellement établi Comité spécial de la Chambre sur la Chine semble susceptible d’envoyer sa propre mission sous peu, surtout suite à la visite récente non annoncée de son président, Mike Gallagher.