La menace économique d'une primauté géopolitique indisciplinée

La menace économique d’une primauté géopolitique indisciplinée

Au cours des dernières années, les experts en sécurité nationale et les décideurs économiques se sont trouvés en désaccord sur la meilleure approche des relations internationales. Alors que les considérations géopolitiques dominent actuellement le débat, les économistes doivent continuer à exprimer leurs inquiétudes quant aux coûts à long terme de la fragmentation.

PARIS – Ces dernières semaines, les discours de dirigeants éminents n’ont pas manqué pour discuter des relations de leur pays avec la Chine et des retombées économiques potentielles de la fragmentation géopolitique. C’est une discussion bienvenue, bien que tardive. Mais elle doit répondre à une question fondamentale : rivalité et intégration économique peuvent-elles coexister et, si oui, sous quelles conditions ? La réponse déterminera le sort de l’économie mondiale.

En février 2020, Jennifer Harris et Jake Sullivan ont publié un article soulignant le besoin pour un changement de mentalité économique. En ce qui concerne la gestion de la mondialisation, ont-ils noté, les professionnels de la politique étrangère se sont largement reportés à la « petite communauté d’experts qui gèrent les affaires économiques internationales ». Ils ont exhorté les spécialistes de la sécurité nationale à intensifier leurs efforts, recommandé une attitude proactive en matière d’investissement public et préconisé une approche plus prudente de l’ouverture commerciale.

La géopolitique et l’économie internationale ont longtemps fonctionné sous deux paradigmes distincts. Les experts en politique étrangère considèrent souvent la politique mondiale comme un jeu à somme nulle dans lequel le gain d’un pays est la perte d’un autre. En revanche, les économistes ont tendance à se concentrer sur le potentiel de gains mutuels de la coopération multilatérale et de l’intégration axée sur le marché. Ces paradigmes contradictoires étaient mariés les uns aux autres par la conviction partagée que le commerce et l’ouverture étaient dans le meilleur intérêt des États-Unis. Le statut hégémonique de l’Amérique avait ses inconvénients, mais les avantages l’emportaient sur les coûts.

A lire également