Le triomphe tranquille d’Anwar Ibrahim
Après avoir été emprisonné à deux reprises, l’homme politique malaisien Anwar Ibrahim a stupéfié le pays en menant une large coalition à la victoire électorale en 2022. Son gouvernement a duré plus longtemps que prévu et est prêt à mettre en œuvre des réformes indispensables qui promettent de soutenir une croissance économique robuste.
SINGAPOUR – Le chemin qui mène du prisonnier politique au pouvoir politique n’est en aucun cas très tracé, mais parmi ceux qui ont parcouru ce chemin ardu au cours des dernières décennies figurent des sommités telles que Nelson Mandela, Jawaharlal Nehru, Aung San Suu Kyi, Michelle Bachelet et Václav Havel. . À ce groupe auguste, il faut ajouter le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim, qui, après neuf ans au pouvoir prisonfait désormais preuve du même zèle que Mandela en faveur de réformes institutionnelles et économiques ancrées dans les valeurs démocratiques.
Quand j’ai rencontré Anwar pour la première fois, en 1976, il était président d’Angkatan Belia Islam Malaysia (ABIM), le mouvement de jeunesse islamique qu’il avait fondé, et semblait destiné à une vie passée dans l’opposition. Mais ensuite, en 1982, le parti au pouvoir, l’Organisation nationale des Malais unis (UMNO), l’a judicieusement invité à rejoindre ses rangs. En 1993, après une ascension rapide, Anwar devient vice-Premier ministre du gouvernement du Premier ministre Mahathir Mohamad et devient son héritier présumé – jusqu’à ce que la crise financière asiatique intervienne. En 1998, Mahathir limogé Anwar à cause de différends politiques qui se sont transformés en soupçons selon lesquels Anwar préparait un coup d’État.
La chute d’Anwar fut aussi rapide que abrupte ; une photo de lui comparaissant devant le tribunal avec un œil au beurre noir et des contusions, courtoisie du chef de la police de Mahathir, a choqué le monde. Anwar a été condamné à deux longues peines de prison et était un détenu de 1999 à 2004, puis de 2014 à 2018. Mais il n’a pas rompu et, pendant cette période, il est devenu le chef d’une opposition nouvellement revigorée.